Depuis quelques années, il est difficile de consulter les réseaux sociaux professionnels sans entendre parler de « data ».

Utiliser les données que les entreprises possèdent pour produire, grâce à des calculs et autres traitements, des analyses et tableaux de bord est devenu de plus en plus commun. La fonction RH n’échappe pas à ce phénomène.

 

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La part des chiffres et du rationnel tend à s’accroître sensiblement dans les RH, amenant notamment les entreprises à se doter de contrôleurs de gestion sociale, experts en pilotage, reporting et gestion des données RH, et à faire monter en compétences les RH en matière de data.

Selon l’étude Digital RH réalisée par Sopra HR et L’usine digitale[1] , pour 53% des entreprises, analyser les données RH de manière pointue représente l’une de principales opportunités du digital RH avec notamment l’amélioration des performances. Avoir des compétences en data semble en effet être aujourd’hui un atout majeur pour les services RH, à de multiples niveaux.

  • En recrutement, les outils du big data et de l’IA permettraient d’approvisionner son vivier externe directement sur le net en aspirant les données LinkedIn et de présélectionner les CV les plus pertinents selon les besoins. En interne aussi, utiliser les données sur les évaluations, les compétences attendues pour les postes ou même les compétences réelles des collaborateurs, permettrait de mieux cibler les candidats potentiels.
  • En Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences ou en Strategic Workforce Planning, les data peuvent aussi être un outil précieux. Par exemple, pour anticiper les besoins internes en matière d’emplois et de compétences, il faut de solides projections et des cartographies qui ne sont possibles qu’avec l'exploitation de données.
  • En formation, il est possible, en croisant des données de coûts de formation et de productivité, de définir un ROI pour cibler les meilleures formations, mais aussi des profils d’apprentissage pour optimiser les choix des canaux de formation et faire de l’adaptative learning.
  • Pour les RRH, c’est un possible outil d’aide au pilotage social permettant d’orienter au quotidien les leaders business : pour recruter selon des données objectives sur leurs services (pyramide des âges, parité homme femme etc) ou comprendre d’où vient l’absentéisme par exemple. Le RRH va donc pouvoir s’appuyer sur des éléments objectifs permettant d’accompagner le business plus efficacement.

  • C’est aussi la possibilité de fixer des KPI pour piloter les projets et rentrer dans un cycle d’amélioration continue. Mais également de calculer les ROI de chaque projet pour mieux convaincre les CODIR de la pertinence des projets RH. En effet selon le global leadership forecast[2], coconstruit par DDI, The conference Board et EY, la pression pour démontrer son impact financier s’est fortement accrue pour les RH ces dernières années (+56% en 2018).

  • Pour les présentations, des outils de data visualisation tel que Tableau ou Power BI permettraient également de construire des documents plus chiffrés ce qui constitue un facilitateur pour les discussions avec les acteurs qui ont l’habitude de parler chiffres plus que RH.

  • En matière de diversité, l’analyse des data peut également être un allié important car elle permet de monitorer ses effectifs pour s’assurer que les objectifs RH sont bien respectés (parité, embauche des jeunes etc). Cette utilisation de la data a d’ailleurs été, d’une certaine manière, institutionnalisée par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. En effet depuis le 1er mars 2019 (pour les entreprises d’au moins 250 salariés, depuis le 1er septembre 2019 ; celles d’au moins 50 salariés depuis le 1er mars 2020), les entreprises ont l’obligation de produire et publier sur leur site internet l’Index égalité hommes femmes, sur 100 points, qui se calcule à partir de 4 à 5 indicateurs clés qui sont fournis grâce à l’utilisation des bases de données RH.

Bien que la maîtrise de la data semble aujourd’hui intéressante pour les acteurs RH, il semble parfois difficile de sensibiliser les collaborateurs à son utilisation. Seulement 11% des chefs d’entreprise pensent que les acteurs RH ont les compétences pour exploiter les bases de données, pour anticiper les futurs besoins de l’entreprise en effectifs et en compétences et y pourvoir, selon le global leadership forecast. Plus inquiétant encore, cette même étude avance que les RH accumuleraient un retard par rapport aux autres services de l’entreprise en matière de digitalisation et d’utilisation de la data (-40% de différence avec les autres services en matière de data et -57% en matière de capacité à évoluer dans un univers digital).  

Il est sans nul doute vrai que les services financiers sont depuis longtemps rompus à l’utilisation d’Excel et de la programmation VBA pour la création de tableaux de bord et leur utilisation en pilotage, là où la fonction RH ne s'est emparée de cette thématique que récemment. D’ailleurs, les formations RH ne proposent encore que rarement des modules d’informatique avancée. Néanmoins, le reporting légal existe depuis longtemps puisque, par exemple, le bilan social est, en France, une obligation depuis la loi n°77-769 du 12 juillet 1977 suite au rapport Sudreau. La production de chiffres n’est donc pas nouvelle et la projection est un travail plus que difficile, quelle que soit la fonction. Travail d’autant plus compliqué qu’il est souvent difficile de prévoir les comportements humains. L'âge auquel une personne va décider de partir à la retraite ou les choix de mobilités sont autant d’exemples de facteurs difficiles à prévoir. Pour autant des méthodes de projection existent, et certains instituts réussissent très bien à prévoir l’évolution des populations. Peut-être que la difficulté naît du fait que les services RH sont en charge du pilotage de la transformation au sein des organisations. Difficile de piloter le changement et en même temps de changer soi-même. De plus les outils présents en entreprise sont souvent peu adaptés à ce genre d’exercice. D’ailleurs 45% des personnes interrogées pour l’étude Digital RH déclarent que les outils et systèmes actuels freinent la digitalisation RH et 37% qu’ils manquent de moyens financiers.

Pour autant, il semble peu pertinent de prétendre que les acteurs RH doivent tous devenir des Data scientists experts en mathématiques. Chaque emploi doit avoir un niveau bien défini de maîtrise de la data dans chaque référentiel des emplois et des compétences. Les experts en la matière se doivent évidemment d’avoir des compétences poussées pour construire les systèmes, mais pour d’autres acteurs, il est peut-être juste nécessaire de comprendre comment fonctionnent les indicateurs et de savoir les interpréter pour avoir à sa disposition un outil supplémentaire de pilotage. Pour certains, être capable, en tant que RH, de comprendre les systèmes de données, les algorithmes et les calculs, sans pour autant savoir les construire, peut être intéressant pour améliorer la qualité du reporting. En effet, toute étude chiffrée comprend des biais liés à la méthode ou aux modes de calcul. Une bonne connaissance de la data, croisée à une expérience des ressources humaines, peut permettre d'aiguiller les spécialités et ainsi de produire des indicateurs performants qui sont en accord avec les objectifs fixés et avec ce que le RH cherche vraiment à mettre en exergue. Cela permet donc d’être partie prenante de la construction et de l’évolution permanente des outils de pilotage et de corriger les erreurs inhérentes à l’exploitation d’une grande quantité de données. Un RH sensible aux data semble donc pouvoir vite devenir un conseiller important pour toute mise en place d’indicateur.

 

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Une chose est certaine, l’utilisation de la data en RH demande également de renforcer ses compétences légales en matière de protection des données. En effet, suite à l’explosion du numérique et son impact sur la vie quotidienne des citoyens, le législateur européen a mis en place de nouvelles réglementations. Le règlement 2016/679 du Parlement européen du 27 avril 2016, dit Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) est, à présent, le texte de référence en matière de protection des données à caractère personnel. Dans le cas des infractions les plus graves, il prévoit notamment une amende qui correspond à 4 % du chiffre d’affaire mondial. Le RGPD concerne le traitement, c’est-à-dire toutes opérations sur des données personnelles contenues dans un fichier numérique ou papier (utilisation, modification, conservation, suppression). Il semble donc particulièrement important, quel que soit le niveau d’utilisation de la data RH dans les entreprises, de former ses collaborateurs RH au RGPD. Bien que souvent de solides bases aient été développées par les collaborateurs car le législateur Français n’a pas attendu le RGPD pour encadrer l’utilisation des données personnelles, notamment avec la loi informatique et liberté.

Si des compétences data pour le RH peuvent donc être intéressantes, il est surprenant de constater que les profils RH maîtrisant la data semblent être particulièrement rares sur le marché du travail, il semble donc difficile d'intégrer des nouveaux éléments pour participer à la montée en compétence. Il faudrait même souvent former les nouveaux arrivants sur cette thématique. Pour autant, l’existence de services rodés à l’utilisation des données dans l’entreprise, comme les services finances, peut être une formidable chance de constituer un vivier de formateurs comme le souligne l’article de la Harvard Business Review « HR leaders need stronger data skills » paru en 2018.

Dans tous les cas les acteurs du secteur sont formels, de grandes avancées ont été faites et chaque année de plus en plus de RH s’emparent de ce nouvel outil. D’ailleurs selon le global leadership forecast2 70% des RH ressentent ces dernières années un besoin de plus grandes compétences en Data. C’est donc une transformation fulgurante qui se joue actuellement dans les entreprises pour une fonction qui prouve chaque jour son intérêt stratégique.

Pour autant il ne faut pas oublier que comme toute nouveauté la data entraîne son lot de fantasmes et de déceptions. La data reste pour autant un outil précieux pour aider les acteurs RH qui ne prend tout son sens que quand il est sous l’œil attentif d’un RH avisé.

 

[1] Etude Le digital RH : réalités et challenges. Sopra HR et L’usine Digitale réalisée du 3 au 25 octobre 2017 auprès de 200 décideurs. https://www.soprahr.com/fr/actualites/actualite/etude-digital-rh-par-l'usine-digitale-sopra-hr-software

[2] Global leadership forecast 2018. Development Dimension International, The conference board EYGM: https://www.ey.com/Publication/vwLUAssets/ey-the-global-leadership-forecast/$FILE/ey-the-global-leadership-forecast.pdf

 

 

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